Le marché locatif est en constante évolution, et les relations entre propriétaires et locataires se complexifient. Une question importante se pose : dans quels cas le locataire peut-il être tenu de payer une partie de la taxe foncière ? La refacturation de cette taxe soulève des questions juridiques cruciales qui méritent d'être examinées en détail.

Définition et distinctions

La refacturation de la taxe foncière, dans le contexte du droit locatif, consiste pour le propriétaire à demander au locataire de participer au paiement de cette taxe. Il est crucial de distinguer ce concept de "repassement" et de "répercussion" de la taxe foncière, qui sont souvent confondus.

  • Refacturation : Le propriétaire facture au locataire une part de la taxe foncière qu'il a déjà payée. Le locataire participe donc au paiement d'une taxe déjà acquittée.
  • Repassement : Le propriétaire ajoute le montant de la taxe foncière au loyer, sans avoir préalablement payé la taxe. Le locataire participe donc au paiement direct de la taxe foncière.
  • Répercussion : Le propriétaire augmente le loyer pour compenser l'augmentation de la taxe foncière. Le locataire participe donc indirectement au paiement de la taxe foncière.

Cadre juridique

La refacturation de la taxe foncière est régie par plusieurs lois et articles du Code civil.

Le code civil

  • Article 1719 : Définit le contrat de location et les obligations du locataire et du bailleur.
  • Article 1723 : Détaille les charges locatives, qui peuvent être réparties entre le propriétaire et le locataire.
  • Article 1724 : Stipule que les charges locatives doivent être clairement mentionnées dans le bail.

La loi ALUR du 24 mars 2014

  • Article 23-1 : Apporte des précisions quant à la refacturation de la taxe foncière et précise les conditions de son application.
  • Article 23-2 : Définit les obligations du propriétaire pour justifier la refacturation de la taxe foncière.

Jurisprudence

De nombreux arrêts de justice ont tranché sur des litiges liés à la refacturation de la taxe foncière. Ces décisions éclairent les conditions de validité de la refacturation et les obligations du propriétaire.

Par exemple, un arrêt de la Cour de cassation de 2018 a confirmé que le propriétaire doit fournir au locataire une copie de l'avis d'imposition foncière pour justifier le montant refacturé. De plus, il a été jugé que la refacturation doit être proportionnelle à la surface du logement loué. Ainsi, pour un appartement de 50m² sur un bien immobilier total de 100m², le locataire ne paiera que la moitié de la taxe foncière.

Conditions de refacturation

La refacturation de la taxe foncière n'est pas systématique et est soumise à plusieurs conditions.

Nature de la taxe foncière

La taxe foncière peut porter sur les propriétés bâties et non bâties. La refacturation peut s'appliquer dans les deux cas, mais il existe des spécificités selon la nature du bien.

  • Propriétés bâties : La refacturation est possible pour les logements et les locaux commerciaux.
  • Propriétés non bâties : La refacturation peut s'appliquer aux terrains vacants, mais la législation est moins précise.

Clauses du bail

La refacturation de la taxe foncière doit être mentionnée explicitement et clairement dans le contrat de location. Le bail doit préciser les modalités de calcul et de paiement de la part de la taxe foncière à la charge du locataire.

Il est également important de noter que le propriétaire a l'obligation de justifier le montant de la taxe foncière refacturée au locataire.

Justification du propriétaire

Le propriétaire doit fournir des justificatifs pour prouver la validité de la refacturation. Il doit présenter une copie de l'avis d'imposition foncière pour démontrer le montant de la taxe payée.

En outre, le propriétaire doit démontrer la proportionnalité de la refacturation au locataire en fonction de la surface du logement loué. Il doit également s'assurer que la refacturation ne représente pas un surcoût indu pour le locataire.

Limites de la refacturation

La refacturation de la taxe foncière est encadrée par plusieurs limites.

Le "repassement"

Le "repassement" de la taxe foncière, qui consiste à ajouter le montant de la taxe au loyer, est souvent confondu avec la refacturation. Cependant, le "repassement" est interdit dans la plupart des cas, sauf si une clause spécifique est prévue dans le bail.

Par exemple, si le loyer mensuel est de 800 € et que la taxe foncière est de 100 €, le propriétaire ne peut pas simplement facturer 900 € au locataire. Il doit d'abord payer la taxe foncière lui-même et ensuite refacturer une partie du montant au locataire.

La "répercussion"

La "répercussion" de la taxe foncière, qui correspond à une augmentation du loyer pour compenser une augmentation de la taxe foncière, est également soumise à des règles spécifiques. Elle est généralement possible, mais elle doit être justifiée par une variation significative de la taxe foncière.

Autres limitations

La refacturation de la taxe foncière ne peut pas excéder le montant réel de la taxe foncière. Le locataire peut contester la refacturation si le montant facturé est supérieur au montant réel de la taxe payée par le propriétaire.

Le locataire peut également contester la refacturation devant les tribunaux si le propriétaire ne parvient pas à justifier la refacturation ou si le montant refacturé est disproportionné.

Cas particuliers

Il existe des situations particulières qui nécessitent une attention particulière en matière de refacturation de la taxe foncière.

Refacturation en cas de colocation

La refacturation de la taxe foncière en cas de colocation est régie par les mêmes règles générales. Cependant, la répartition de la taxe foncière entre les colocataires doit être proportionnelle à la surface occupée par chacun. Le propriétaire a une obligation envers chaque colocataire pour justifier la part de la taxe foncière refacturée.

Refacturation en cas de bail commercial

La refacturation de la taxe foncière dans le cadre d'un bail commercial est régie par des dispositions spécifiques du Code de commerce. Les clauses du bail commercial doivent être particulièrement claires et précises concernant la refacturation de la taxe foncière, et les obligations du bailleur et du locataire.

Refacturation en cas de logement social

Les logements sociaux sont soumis à une réglementation particulière concernant la refacturation de la taxe foncière. Les bailleurs sociaux ont des obligations spécifiques et ne peuvent pas refacturer la taxe foncière au locataire sans respecter des conditions strictes.

Informations supplémentaires

En plus des points évoqués ci-dessus, il est important de noter que:

  • Le propriétaire doit informer le locataire de la refacturation de la taxe foncière avant la signature du bail.
  • Le locataire peut négocier la refacturation de la taxe foncière avec le propriétaire.
  • Le locataire peut contester la refacturation de la taxe foncière devant les tribunaux.

La refacturation de la taxe foncière au locataire est un sujet complexe qui soulève de nombreuses questions juridiques. Il est important de comprendre les règles qui régissent cette pratique pour garantir une gestion transparente et équitable des relations locatives.